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Entretien avec Said Bajji

Pour la vérité, contre l’impunité ...

mercredi 20 décembre 2006, par Yafelman

Tout a été fait pour que la mémoire oublie Boujemâa Hebaz, un jeune militant amazigh disparu il y a de cela 25 ans. La responsabilité de l’Etat marocain est incontestable : l’on veut pour preuve cette volonté délibéré à enterrer l’affaire Hebaz...
Pour contribuer à lutter contre l’amnésie et œuvrer afin que la vérité émerge, un livre intitulé "Boujemâa Hebaz, kidnappé sans adresse" vient de paraître à Tamazgha occidentale. Nous avons rencontré son auteur, Saïd Bajji, journaliste à Rabat, qui a accepté, volontiers, de répondre à nos questions.


Pourquoi un livre sur Boujemàa Hebaz, 25 ans après sa disparition ?

D’abord, je dois signaler que ce travail avait nécessité trois ans et demi d’enquêtes et d’investigations. Je n’ai, en fait, bouclé la rédaction des derniers paragraphes du livre que vers la fin du mois de mars précédent. Pour le choix des langues du livre, j’ai opté, dans un souci de complémentarité et afin d’assurer une large diffusion de l’ouvrage, pour l’amazighe, le français et l’arabe. Du coup, le nombre des pages atteint 340.
J’ai veillé à ce que ce livre sur Boujemâa Hebbaz soit publié au cours de cette année, d’une part pour rendre hommage à la mémoire de ce martyr de la cause amazighe, d’autant plus que cette date coïncide avec l’écoulement d’un quart du siècle après son enlèvement criminel, le 19 avril 1981 à Rabat, par la police politique du régime alaouite oppresseur et réactionnaire. D’autre part, j’ai saisi l’occasion de la fin des travaux de l’Instance Equité et Réconciliation (IER) pour dénoncer le caractère démagogique de la démarche du régime qui, vu sa nature anti-amazighe, exclue pour le présent et pour l’avenir toute possibilité de faire la lumière sur cet évènement tragique et de punir les responsables de ce crime qu’ils soient commanditaires ou exécutants.

Que représente actuellement Hebaz aux yeux des jeunes militants amazighs à Tamazgha occidentale ?

L’engagement de Hebaz et sa détermination sans faille à œuvrer pour la libération de la nation amazighe opprimée du théocratisme alaouite, ont fait l’objet d’un complot de silence depuis sa disparition. Actuellement, et grâce aux efforts conséquents des militants amazighs, la jeunesse amazighe, à fort potentiel militant, commence à reconsidérer l’histoire du combat de Hebaz considéré comme une figure emblématique de l’action idéologique amazighe.

Pourquoi, à votre avis, les "amis d’hier" de Hebaz essayent maintenant de salir sa mémoire ?

Il est normal que ses "amis d’hier", après avoir participé directement à ce crime en collaboration avec le régime marocain ou indirectement par l’entretien de la confusion, cherchent actuellement à salir sa mémoire. Les propos diffamatoires tenus par ces Berbères de service arrivistes ont pour but de minimiser l’impact de l’affaire Hebaz sur l’opinion publique nationale et internationale. Une fois de plus, le pouvoir dynastique mise sur la férocité et la servilité de ces Berbères pour banaliser ce dossier.

Que revendique actuellement la famille Hebaz ?

A l’instar de toutes les victimes de la terreur despotique alaouite, la famille Hebaz, qui a souffert le martyr, a lutté et continue de lutter pour connaître le sort de son fils et pour punir les responsables de ce crime d’Etat. Le combat de cette généreuse et brave famille amazighe du Sud fait partie de l’action de l’ensemble des victimes du régime pour la vérité et contre l’impunité.

Propos recueillis par
Lhoussain Azergui