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Décolonisons nos contes et légendes
samedi 16 avril 2022, par
« Tin ḍart wafa » est le titre d’un livre collectif qui vient de paraître à Tafilalet. Il est édité par l’Association « Ad nuru s Tmaziɣt » et regroupe plusieurs dizaines de contes amazighs collectés dans la région de Tafilalet-Dra.
Le titre évoque les contes narrés autrefois autour du feu (almessi). Au moins trente contributeurs ont pris part à cette initiative visant à sauver de l’oubli ces contes anciens.
L’idée est certes louable, mais ces textes se révèlent, toutefois, de véritables vecteurs de l’imaginaire arabo-musulman. C’est un « poison » qu’on sert aux générations futures. Les contes devaient être, à mon avis, réécrits et racontés, non comme le faisaient nos anciens, mais avec les mots d’aujourd’hui, tout en ayant en tête que nous menons un combat idéologique contre des régimes qui déploient tous les moyens pour nous dissoudre dans l’arabo-islamisme.
Certes, ces contes sont narrés de cette façon depuis des générations, mais rien ne nous empêche de remodeler le moule et de les façonner en leur donnant un nouveau visage.
L’esprit de l’Amazighité a déserté ces textes qu’on espère préserver, mais cette entreprise, visant à préserver, est plutôt marquée par l’esprit de la défaite. C’est de ce point de vue de la défensive que cette défense est faite et celle-ci est toujours réduite à des « défenses ». On ne pense qu’à conserver et à momifier. C’est plutôt une attitude offensive qu’il convient d’adopter pour défendre nos contes en cassant le vieux moule, en les dépoussiérant et les propulsant dans la modernité.
Il nous faut surtout de véritables perspectives. Celle, par exemple, d’inscrire cette collecte dans un projet visant à récupérer notre culture, à la débarrasser des influences néfastes de l’arabo-islamisme en donnant des noms amazighs aux personnages au lieu des « Jorha Ali », des « Mohamed », des « Fadma » et autres. Il est aussi crucial de réécrire ces textes de façon à ce que les enfants puissent les assimiler.
Il faudra par ailleurs se démarquer de l’anti-judaïsme qui caractérise la plupart de nos contes dans lesquels on retrouve souvent des expressions du type : « A yuday ad k-issekmeḍ ṛebbi » (Ô juif, que Dieu te brûle). Cette expression consacre l’infériorité des juifs, la dhimmitude et la supériorité des musulmans.
Pour mener à bien de pareils projets de collecte surtout des contes, il ne faut pas être nostalgique mais plutôt pragmatique. On ne bâtit rien de solide sur les méandres de la nostalgie.
Aksil Azergui
