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Lundi 21, mardi 22, mercredi 23, jeudi 24 avril 1980.

Département de Tizi-Ouzou.

mercredi 21 avril 2004, par Masin

Lundi 21, mardi 22, mercredi 23, jeudi 24 avril 1980.
- Wilaya de Tizi-Ouzou.

A Alger bien entendu, la presse ne donne aucune information sérieuse sur ce qui se passe à Tizi-Ouzou, si ce n’est des commérages ridicules.

Les radios et surtout la presse est censurée et les radios se voient vite intimer l’ordre par le gouvernement français de "baisser le ton" en raison de la négociation sur le prix du gaz. En tout cas, dès le dimanche 20 avril dans la journée, une fois la prise d’assaut connue, toute la population s’est mise en grève, déambulant dans les rues de Tizi et commençant très rapidement à manifester. Les affrontements ont commencé très tôt. Très rapidement l’hôpital ne soigne plus les blessés civils qui doivent se faire évacuer tout seuls sur Alger. En outre des policiers circulent avec des listes parmi les blessés civils pour en "récupérer" certains. On parle de nombreux blessés graves chez la police et même de décès.

Une chose est certaine : c’est qu’il y a eu des salles spéciales fermées au public dans l’hôpital. Un exemple bien caractéristique de répression : un parent sort pour se rendre à la Wilaya ; il est aussitôt pris en chasse par un groupe de CNS ; tombé à terre, il se fracture l’avant-bras, mais les policiers lui lâchent les chiens qui lui "labourent le dos". Arrêté, hurlant, il sera conduit jusqu’à la mairie, puis relâché et invité à quitter Tizi-Ouzou, puisque à l’hôpital il n’était pas possible de le soigner ; il a fallu qu’il arrive à Alger pour se faire soigner sérieusement.

Les lundi, mardi et mercredi, c’est une véritable guerre civile qui se déclenche dans toute la Kabylie (grande et petite). A Tizi-Ouzou, les forces de l’ordre ne circulent plus dans la ville déserte qu’en patrouille nombreuse (une douzaine) avec chiens et armes. La population civile, dès qu’elle les voit, leur jette pierres, bouteilles de gaz, huile bouillante, détritus, cocktails molotov et bombes artisanales. Inversement, la police dès qu’elle aperçoit des civils dans la rue les attaque à coups de grenades lacrymogènes et de chiens lâchés (souvent abattus à coups de fourche...) Les forces de l’ordre ont reçu beaucoup de compagnies en réserve, y compris des soldats de l’ANP (consignés dans quatre casernes).

L’hôpital de Tizi aurait été renforcé par des infirmiers descendus d’Aïn-El-Hammam. Tizi est rapidement isolée du reste de l’Algérie par le fait que les lignes de cars SNTV ont été supprimées suite à l’incendie d’un car et de la gare routière ; ceci est sans aucun doute le résultat d’une provocation de la police désireuse d’empêcher les gens de se rendre à Alger pour manifester [1].

Le mardi 22 des boulangers proposent de cuire du pain gratuitement et de le livrer aux filles de la Cité universitaire de Medouha.

En dehors de Tizi-Ouzou, les gendarmes évacuent la plupart des brigades de gendarmerie situées dans les communes de
montagne : certains ont même levé le drapeau blanc (on parle de Tassaft, des Ouacifs, Tamazirt, etc.). En haut de Tizi-Ouzou, les CNS se retrouveront encerclés par la population venue de Ouaguenoun Belloua, etc.) qui leur fait rouler dessus des barils d’huile ; les CNS rendent leurs armes (fusils, lance-grenades, etc.) et s’en vont.

En règle générale, chaque matin, les populations (y compris celles des villages environnants), descendaient pour manifester des les rues de la ville, sachant que les manifestations tournaient inévitablement à l’affrontement. De Larbaa Naît Irathen, par exemple, ce sont tous de transports (camions, taxis, cars.etc.) qui sont réquisitionnés par la population qui descend sur la plaine pour "défendre les étudiants". Ils arriveront jusqu’à Oued Aïssi, où un fort contingent de gendarmes réussira à les contenir. Par contre, les gens de Ouaguenoun, Maatkas, Béni Douai, ont réussi à parvenir à Tizi. En tout cas, en Haute Kabylie, les "autorités" locales se sont évanouies : présidents d’APC, chefs de Daïrates, chefs des kasmates du FLN, etc., se sont volatilisés. L’isolement de la Kabylie est renforcé par le fait que l’essence est venu à manquer ; en outre, le ravitaillement devenait impossible.

Le jeudi 24 après-midi, peu à peu les boutiques rouvrent leurs portes. Le soir à la télévision, on montre quelques images qui se veulent rassurantes. On dit que les anciens Moudjahidines seraient intervenus pour appeler les gens au calme.


 Dimanche 20 avril 1980
 Samedi 19 avril 1980
 Vendredi 18 avril 1980
 Jeudi 17 avril 1980
 Mercredi 16 avril 1980
 Mardi 15 avril 1980
 Lundi 14 avril 1980
 Dimanche 13 avril 1980
 Samedi 12 avril 1980
 Vendredi 11 avril 1980
 Jeudi 10 avril 1980
 Mercredi 9 avril 1980
 Mardi 8 avril 1980
 Lundi 7 avril 1980
 Dimanche 6 avril 1980
 5 avril 1980
 4 avril 1980
 Du 26 mars au 1er avril 1980
 Du 9 au 25 mars 1980


[1Plusieurs témoignages formels confirment que le saccage de la gare s’est produit au vu et au su des forces de police, sans que celles-ci interviennent ;