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Trois villages amazighs de Tunisie se mobilisent pour leurs droits

mercredi 20 juin 2012, par Masin

Quoi de plus normal qu’un régime arabiste planifie l’éradication du peu de l’amazighité qui subsiste en Tunisie ?


Ce qui s’est passé dans la région de Matmata ce 16 juin 2012 illustre bien cette politique anti-amazighe menée par les nouvelles autorités tunisiennes issues de "la tempête" de 2011 qui s’est abattue sur cette région de Tamazgha. En effet, le gouvernorat de Gabès, censé répartir un budget destiné au développement des différents villages et villes de Matmata, a trouvé le moyen d’"oublier" trois villages et qui n’ont donc pas pu bénéficier d’un financement de projets de développement qui est pourtant leur droit. Et comme par hasard ce sont les trois villages de la région où la langue amazighe est encore vivante qui ont été la cible du gouverneur de Gabès.

Les habitants des villages Tamezret, Taouejjout et Azrou ont alors commencé par soumettre leurs doléances au gouverneur et ont demandé qu’ils soient reçus. Leurs demandes sont pourtant modestes : réalisation des travaux d’assainissement, aménagement de certains services publics comme le seul dispensaire de la région, etc. Les différentes démarches des citoyens n’ont pas été entendues et la dernière en date fut la fin de non recevoir réservée par le gouverneur à leur demande d’audience le 15 juin 2012.

Pourtant les demandes des villageois sont basiques et relèvent des besoins élémentaires indispensables pour assurer une vie à peu près descente aux citoyens. Et que dire si ces villageois avaient demandé au gouvernorat d’affecter des moyens pour la protection du patrimoine des villages qui est sérieusement menacé ? C’est le cas, par exemple, de l’ancien village d’Azrou qui est à l’état de délabrement alors qu’il mérite d’être protégé.

Le samedi 16 juin 2012, les villageois de Tamezret, appuyés par des citoyens des villages de Taouejjout et Azrou, ont décidé d’investir la rue et ont organisé un rassemblement public arborant des pancartes demandant à ce que leurs villages ne soient pas marginalisés et exigent leur part dans les projets de développement. Ils ont demandé justice dans la répartition des investissements pour le développement de la région de Matmata.
Une brigade anti-émeutes a été rapidement déployée sur les lieux du rassemblement. Aucun incident ni affrontement entre manifestants et forces de police n’a été signalé. Cependant, des négociations entre représentants des villages et des officiers de l’armée ont été entamées pour éventuellement désigner une délégation qui sera reçue par le gouverneur.

Brigade antiémeutes dépêchée à Tamezret



Il n’y a aucun doute quant aux motivations des autorités tunisiennes dans cette volonté de priver ces villages amazighophones d’accéder à leurs droits. La stratégie est connue et rodée en Afrique du Nord ; elle a même donné suite à des résultats probants pour les régimes arabo-musulmans d’Afrique du Nord tels que l’Etat algérien ou le régime kadhafiste. La stratégie consiste à asphyxier les villages amazighs et pousser la population à l’exode. Une fois dans les centres urbains, ils se mélangent et finissent par être assimilés dans la masse arabophone ce qui, par la force des choses, fait disparaître en douceur les langue et culture amazighes. Une autre stratégie consiste à faire venir dans des villages ou villes amazighophones des populations arabophones pour qui, très souvent, l’Etat construit des habitations ; cette présence au milieu des amazighophones finit, très souvent, par les contraindre à l’arabisation. Kadhafi, par exemple, a installé des villages entiers au voisinage de villages à Adrar n Infusen. L’Etat algérien a été jusqu’à installer en Kabylie des islamistes « repentis » qui ont activement contribué à sombrer la Kabylie dans ce mal qui la ronge depuis au moins deux décennies et qui ne cesse de prendre de l’ampleur.

Le régime arabiste de Tunis doit voir la tâche encore plus facile puisque le nombre de villages encore amazighopones doit se compter sur les doigts des deux mains. Lequel régime doit être impatient d’achever cette politique d’éradication de l’amazighité. Mais Imazighen de Tunisie ne comptent pas baisser les bras et ne semblent pas être prêts à subir la politique de marginalisation et d’assimilation que les nouvelles autorités tunisiennes semblent vouloir mener à leur égard.

Il est certain que la politique tentée par le gouvernorat de Gabès doit être la même qui est menée également par les gouvernorat de Djerba et de Tattaouine où existent encore des villages amazighophoes comme Iqellalen et Aït-Ouasigher à Djerba, ou encore Douiret, Tattaouin et Chenini. Et l’action des trois villages de Matmata donnera certainement des idées aux autres villages qui, il est fort probable, mèneront des actions dans les jours qui viennent et qui feront entendre leurs voix afin d’arracher leurs droits.


Masin FERKAL

Un quartier du village Tamezret

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