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Déclaration de Nna Aldjia, mère de Lounès Matoub
Message à ma grande Famille : LA KABYLIE
mardi 13 mai 2003, par
L’assassinat programmé de mon fils Lounès par le pouvoir et les BOCUS en Kabylie le 25 juin 1998, reste d’actualité. La volonté politique du régime à nommer les assassins, comme il nomme un premier ministre, me conforte sur l’incrédibilité de la thèse officielle sur l’identité des véritables assassins de Lounès.
Les diverses tentatives de récupération, de manipulation, de diversion et de mise sous tutelle politique de ma famille, fragilisée par la disparition tragique de Lounès, m’amène aujourd’hui à faire tomber le voile du monsonge entretenu qui a suivi la mort de mon fils unique. Il est temps que la vérité, longtemps baillonnée voit enfin le grand jour. C’est salutaire pour l’Algérie et la Kabylie en particulier.
Depuis quatre longues années, vous avez toutes et tous suivi la campagne médiatique contre la famille Matoub orchestrée et exécutée par des agents qui ont bu dans "la cruche de l’injustice et de l’opression", sous couvert d’une "amitié" combien même trahie. La BOUSSOUF du Soir d’Algérie m’a traitée de "bête de fête forraine", le HAMMOUCHE de LIBERTE, de "mère biologique", comme si Lounès avait tété une chèvre, "RU AY UL = PLEURE MON COEUR", comme disait Lwennas-iw.
Ils utilisent le mensonge, l’insulte, la supériorité des armes et des médias pour instaurer la peur, la confusion et le doute sur notre intégrité afin d’asseoir "le verdict du crime islamiste" sans enquête ni procès, avec la bénédiction de leur maîtres et le silence complice des défenseurs "de la République laïco-démocratique d’Alger" qui ont utilisé "comme pemanence électorale" la maison de mon fils le jour de son enterrement.
Où sont-ils aujourd’hui pour dénoncer l’impunité et les atteintes aux droits de l’Homme ? Les mises en scène ont assez duré. Je ne peux plus accepter et supporter les agressions contre la seule personne qui me reste ; MA FILLE UNIQUE.
Je n’ai pas pu sauver mon fils de la traîtrise (aghurru) et d’une mort annoncée, mais je ne laisserai jamais ses assassins et leurs complices souiller sa mémoire et nous empêcher, ma fille et moi, de démasquer les commanditaires et les assassins.
Nous ne servirons jamais de tremplin à aider à se maintenir les serviteurs du régime en Kabylie.
Les masques sont tombés, ceux qui ont sacrifié Lounès et vendu la Kabylie pour avoir des places sont connus.
Certes, Lounès n’a laissé que des femmes et c’est facile pour les comparses du régime, habitués à gérer les veuves des victimes en leur procurant des visas d’installation à l’étranger et des appartements.
Mais cette fois-ci, leurs calculs ont echoué, il y a un grain de sable qui a fait grincer la machine à broyer qui tourne depuis une décennie, c’est Malika MATOUB, la digne sœur de Lounès, qui a été très bien préparée par son frêre depuis des années pour lui succéder à la tête de notre famille.
Aujourd’hui ma fille subit leurs foudres, avec des procès en diffamation en Algérie et en France, des campagnes de déshonneur, un lunchage médiatique, un isolement, un appauvrissement, des menaces physiques et un harcèlement moral digne de la férocité barbare. Tout ça pour l’empêcher d’honorer le serment fait à son frère, qui lui a dédié ces paroles :
"Que puis-je te dire, ma sœur ? Des forces suprêmes dominent notre destin ! Que puis-je te raconter ? Le malheur fut notre nourrice au premier pas. Sur la voie du défûnt, considère-moi parti. Ce mal incurable m’a broyé, je fléchis ; Je n’ai ni joie ni distraction. Garde si l’honneur s’en va ! Va, père, va, Va père, toi que j’aime tant, va ! ("Au nom de tous les miens")
Pourquoi cet acharnement pour nous empêcher de revendiquer une enquête sérieuse aux autorités sans qu’ils se mettent à distiller des horreurs sur notre famille qui a déjà assez souffert de la disparition tragique de Lounès.
Nous refusons de les suivre, nous refusons leur tutelle, nous n’avons pas confiance en eux, c’est notre droit légitime. Nous refusons d’être les faire-valoir de ceux qui sont déchus de leur kabylité et qui labourent et sèment la mauvaise graine pour des officines ennemies de notre amazighité et de notre région.
En ma qualité de chef de famille, j’ai été amenée avec ma fille à créer la Fondation Lounès MATOUB dans l’urgence, le 12 octobre 1998 à Taourirt Moussa, son village natal et lieu de sa demeure éternelle oû des milliers de pèlerins en quête de vérité s’y rendent pour se recueillir sur la tombe de Lounès et non pour alimenter "une boutique", comme le prétendent "les tueurs à gage".
Oui, cette Fondation est créée dans l’urgence avec des personnes honnêtes pour que les malpropres ne s’accaparent pas la mémoire de mon fils.
Je les ai assez vu et supporté chez moi au point de perdre mon fils. Mon cœur de mère n’a jamais supporté leur présence, ils sont des oiseaux de mauvaise augure.
Notre motivation est simple, couper l’herbe sous les pieds des gestionnaires mortuaires, qui ont toujours préféré l’amitié des cimetières à celle des vivants. Sinon comment expliquer la séquestration du passeport de ma belle-fille pendant sept mois par la secte Saadi-Ait Hamouda ?
Pourquoi cet acharnement contre le fait de vivre grâce à l’héritage de Lounès ? Est-ce un crime de continuer à vivre de ses propres biens et non de la charité ?
– Avons-nous profité des largesses du pouvoir comme eux ?
– Avons-nous détourné l’argent du contribuable ?
– Avons-nous eu des appartements, des lots de terrains, des biens à l’étranger et des voitures blindées ?
– Avons-nous monnayé le sang des martyrs et la détresse des orphelins ?
– Avons-nous habité des résidences d’Etat au Club des Pins par exemple ?
– Avons-nous empêché une famille de demander justice ?
– Avons-nous des liens avec des terroristes ou les services ?
– Avons-nous menacé qui que ce soit de mort ? et la liste est longue…
– Est-ce que je dois me justifier auprès des assassins et commenditaires ?
Reprenons nos esprits, mettons à nu les faux kabyles en service recommandé, dont la mission est "d’encorner nos montagnes" et de nous faire perdre nos valeurs.
Mettons un terme aux fossoyeurs de notre kabylité qui marchandent nos morts et nos vies pour exister, LOUNES avait compris et malheur à celui qui cherche à comprendre. Les cercueils gravés du symbole Amazigh sont prêts ; j’en ai un spécimen à la maison qui avait été reservé à Lounès.
Lounès Matoub disait "ghelluy d lefhama, tanekra d ssâaya = tomber est un enseignement, se relever est une richesse" et ce n’est pas fini, le chemin est encore long, la perfidie, la compromission, les diversions et la traîtrise sont de mise, mais nous n’avons pas le choix c’est notre KABYLIE qui est devenue un enjeu. A nous tous de sauver ceux qui restent avec la détermination et la résistance des "HOMMES PROBES", la Kabylie se relèvera une fois de plus, cette région n’est ni à sa première saignée ni à sa première traîtrise.
Le sacrifice de Lounès et ses enfants, fleurs de notre Printemps, nous a ouvert les yeux, nous avons pris conscience que les "HATTAB" étaient partout et nous n’avons pas peur de mourir en Kabylie pour l’Algérie de demain. "Tafsut Tefka-d Tikuffta = le printemps berbère a nourrie la rage"…
Les voleurs, les dévoreurs d’os, les rentiers de la révolution, les trabandistes mortuaires, les faux amis, les faux frères, les assassins, leurs complices qui veulent être nos tuteurs ne respectent aucun code d’honneur sauf celui de la famille qu’ils entretiennent depuis longtemps.
J’avais souvent douté de leurs mauvaises intentions, ils voulaient connaître l’intimité de la maison et s’en servir le moment venu. Le jour est arrivé où le messager mercenaire s’est mis à table en écrivant son venin dans un livre : "des vérités, anathèmes et dérives sur l’assassinat de Lounès Matoub". Il croit avoir réussi à se venger de Lounès en s’attaquant à sa famille et se laver ainsi de son crime, il s’est encore enfoncé plus. Alors qu’il avait encore une chance de se repentir profitant de la concorde civile .
Il n’a fait que traduire les conclusions brodées de la justice algérienne dans l’affaire Matoub, ce livre est la suite logique de la mascarade programmée par le pouvoir pour enterrer encore une fois de plus Lounès, mais FAQOU.
"Am win akken yesderghel uh’uli = comme celui qui est aveuglé par un bouc, il est aux abois, il sait qu’il est détesté, vomis, honnis, discrédité et craint. Il continue à être ce spadassin turbulent et agressif. Il va de compromission en compromission. Certes, ses agissements freinent et perturbent le chemin vers la vérité, mais il ne l’empêchera jamais de voir le jour. "ZIGH YATTFAKA TTLAM…".
Ce n’est ni les jacassements, ni le dénigrements, ni les aboiements qui nous détourneront de notre quête de justice.
Je suis heureuse aujourd’hui, d’avoir survécu à la mort de mon fils pour entendre les aveux de ses assassins même si l’Ambassade de France refuse de me livrer un visa pour assister ma fille. Le visa est devenu une malédiction pour ma famille, c’est normal, je ne suis pas députée, ni la mère d’un "politique" encore moins une corrompue du système mais une citoyenne algérienne, femme kabyle sans bras long.
Quant au pouvoir algérien, je ne l’ai pas oublié dans cette affaire, il est responsable des dérives de sa justice et de ses représentants.
Qu’attend le Président de la République pour relacher les candidats à l’inculpation, Chenoui et Medjnoun, version RCD ?
Nous exigeons des autorités judiciaires la réouverture d’une véritable enquête et citer les rémoras du régime assassin, à s’expliquer, en tenant compte des déclarations de ma belle- fille, témoin du crime, qui les a accusés publiquement.
Aucune raison d’Etat ne nous empêchera d’aller jusqu’au fond de ce dossier, mon fils unique a été assassiné, et je veux savoir le comment ?, le pourquoi ? et le qui ?, visible.
Enfin, malgré le fait que les malfaisants ont exténué notre pays, que les décideurs se sont enrichis, notre sagesse et notre don de soi sont supérieurs, nous nous reconstruirons sans ceux qui ont trahi et bafoué nos valeurs ancestrales.
La Kabylie de Matoub vaincra.
"Yenna-yas : A baba wweten-agh,
Yenna-yas : a mmi âqqel-agh"
Nna Aldjia,
Mère de Lounès Matoub
Taourirt Moussa, le 12 mai 2003