Accueil > Actualité > Communiqués et déclarations > Imazighen : victimes de l’arbitraire de l’Etat marocain
Imazighen : victimes de l’arbitraire de l’Etat marocain
Communiqué de Tamazgha
mardi 18 mars 2003, par
Communiqué
Derrière les splendeurs des palais de l’Etat marocain se cache un régime autoritaire. La démocratie de façade, construite de toutes briques, n’est que de circonstance et ne participe que du décorum. Entretenant sa domination par une violence illégitime, l’Etat marocain s’illustre pathétiquement dans la violation raisonnée des droits élémentaires des Imazighen (Berbères).
L’agression officielle dont sont sujets Imazighen sont autant de constantes "nationales" et de repères pour la monarchie dont les racines remontent jusque dans les années 30. Souvenons-nous de ce que Abdelkrim El Khattabi, résistant amazigh contre l’occupant franco-espagnol, fut combattu par le sultan lui-même.
Depuis l’"indépendance", la violence n’a cessé de s’amplifier jusqu’au jour où en mai 1994, des militants de l’association Tilelli (Goulmima) ont été arrêtés et condamnés pour "atteinte à la sûreté de l’Etat", leur faisant ainsi payer le prix de leur mobilisation pour Tamazight. Et, depuis lors, les intimidations contre les militants amazighs n’ont de cesse. Aujourd’hui, un pic dans la gradation de la violence vient d’être atteint.
Mbarek Taouss, militant de l’association Tilelli, ex-détenu politique, vient de subir l’arbitraire des autorités marocaines. En effet, le 28 février dernier, à Tinghir (Ouarzazate), Mbarek Taouss a fait l’objet d’un enlèvement suivi de coups et blessures graves qu’il impute lui-même aux services de la direction de surveillance du territoire marocains (DST) accompagnés de policiers en uniforme.
Dans une déclaration rendue publique le 4 mars 2003, la victime donne le témoignage suivant : "Quatre personnes se sont jetées sur moi, m’ont mis à terre et se sont mis à me rouer de coups de pied, de coups de poing. Ils m’ont traîné par terre et ont continué à me tabasser. Ils m’ont menotté. Je leur ai demandé d’arrêter de me torturer et de me traduire en justice si j’étais accusé de quoi que ce soit. Je leur ai demandé d’appeler une ambulance car ils m’ont grièvement blessé : je saignais du nez, de la bouche. (…) Mes affaires traînaient par terre. […]".
S’en prendre de cette manière à Mbarek Taouss procède d’une volonté délibérée à jeter la crainte sur l’ensemble du mouvement amazigh dont Mbarek Taouss est devenu, par sa riche contribution et son engagement indéfectible, l’un des acteurs essentiels.
Cet événement douloureux nous éclaire sur la nature du système politique marocain. Bâti sur le culte de l’arabité, il prône l’assimilation des Imazighen en contradiction avec toute idée de liberté, de justice et d’humanité. A la lumière du sort réservé à Mbarek Taouss, nous comprenons, une nouvelle fois, combien est-il dangereux, dans le Maroc d’aujourd’hui, de vivre librement sa berbérité. Ainsi se pose avec une acuité particulière, la question de ce que d’aucuns considèrent être une "politique berbère du Maroc".
Les quelques concessions royales accordées aux Imazighen, parmi lesquelles la création de l’IRCAM sont finalement, au regard du sort réservé aux militants amazighs, que des mesures de pacotille destinées à calmer le jeu et à recomposer le champ berbère à la faveur du Makhzen en vue de sa domestication.
La quiétude et le courage de notre compagnon Mbarek Taouss suscite en nous un profond respect. Nous lui assurons notre soutien solidaire.
Tamazgha,
Paris, le 9 mars 2003.