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La question amazighe au Maroc
Rapport de Tamazgha au CERD
dimanche 8 juin 2003, par
TAMAZGHA
Organisation Non Gouvernementale
de défense des droits des Imazighen (Berbères)
47, rue Bénard - 75014 Paris
Tel : +33.1.45.45.72.44. / Fax : +33.1.49.81.02.32.
E-mail : Tamazgha@wanadoo.fr - http://www.tamazgha.fr
La question amazighe au Maroc
Rapport alternatif de Tamazgha
au
Comité pour l’Elimination de la Discrimination Raciale (CERD)
Nation Unies
Conseil Economique et Social
Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (ICERD)
62eme session du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale
Genève, 3-21 mars 2003
Sommaire
Préambule
Partie 1. -
Données générales : historiques, politiques, sociologiques et éducationnelles
I. Introduction
A. Généralités
B. L’Afrique du Nord, une terre amazighe
II. Le mouvement amazigh : bref rappel historique
A. L’époque coloniale ou les origines de la discrimination
B. Les Berbères après l’indépendance : le mouvement amazigh
Partie 2 -
Principales violations de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale
I. La négation officielle et constitutionnelle du fait amazigh (berbère)
A . L’exclusion et la discrimination constitutionnelle
B. Une arabisation oppressive
II Les réponses officielles biaisées
A . L’introduction du berbère dans le système éducatif
B. L’IRCAM, pour un freinage en douceur du mouvement amazigh
C. L’adoption de l’alphabet tifinagh : une arme pointée contre la langue berbère elle-même ?
Partie 3 -
Nos propositions pour éliminer les discriminations officielles
Références bibliographiques
Annexe 1. Liste partielle des associations berbères
Annexe 2. Communiqué de MM. Hamid Lihi et Ali Harcherras
Annexe 3. Communiqué de l’association AZEMZ
Prémabule.
Pour que le lecteur non familier des questions culturelles qui divisent gravement l’Afrique du Nord comprenne l’ampleur du déni qui est fait aux berbérophones par l’Etat national, nous allons exposer très rapidement le cours de ce problème avant de rappeler les éléments historiques, politiques, sociologiques et éducatifs (Partie 1) ainsi que les principales discriminations officielles desquelles procèdent les violations des stipulations de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Partie 2) et nos propositions pour éliminer ces discriminations (Partie 3).
PARTIE 1.
Données générales : historiques, politiques, sociologiques et éducationnelles
I - Introduction
A - Généralités
Au Maroc, et plus généralement en Afrique du Nord, un très grave déni culturel et identitaire basé sur la discrimination est à la base de l’action de l’Etat national qui se veut arabe et musulman et engage toutes ses forces pour arabiser les berbérophones.
L’objet de cette discrimination officielle permet d’établir la violation des principes de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Il s’agit d’une atteinte extrêmement grave aux droits culturels des berbérophones, par ailleurs reconnus par tous les textes internationaux, au premier chef de la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale que le Maroc semble ignorer depuis toujours.
Cette politique qualifiée qui confine à un « impérialisme linguistique » empêche naturellement la société d’aller vers un véritable pluralisme et une véritable démocratie nécessaires à la lutte contre le sous-développement. Une folle énergie sociale est ainsi dilapidée à contrarier les valeurs ancestrales et l’identité première des Berbères au lieu d’en faire le point d’appui pour la construction d’une société vraiment réconciliée et ouverte, plurielle et démocratique.
L’arabisation est ainsi au cœur d’une politique étatique de négation des droits humains les plus élémentaires, négation au demeurant raciste, puisque l’Arabe est préféré officiellement et constitutionnellement au Berbère, ce dernier nié, et renvoyé dans le meilleur des cas à une existence folklorique ou historique.
B - L’Afrique du Nord, une terre amazighe
Tous les historiens de l’Afrique du Nord attestent que le pays est peuplé de Berbères depuis les temps les plus anciens. Ainsi, Ibn Khaldoun dans son Histoire des Berbères, peut écrire à propos du pays que l’on appelle le Maghreb et que nous appelons Tamazgha ou pays des Imazighen : "Depuis les temps les plus anciens, cette race d’hommes habite le Maghreb dont elle a peuplé les plaines, les montagnes, les plateaux, les régions maritimes, les campagnes et les villes" (Ibn Khaldoun - Histoire des Berbères, Paris, Geuthner, 1999 p. 167).
Concernant tamazight, la langue des Imazighen : "leur langue est un idiome étranger, différent de tout autre : circonstances qui leur a valu le nom de Berbères" (Ibn Khaldoun, 1999, opus cité p. 168).
Concernant, enfin, les religions professées en Afrique du Nord : "il y avait parmi eux [des tribus] qui professaient la religion juive ; d’autres chrétiennes, et d’autres païennes, adorateurs du soleil, de la lune et des idoles. Comme ils avaient à leur tête des rois et des chefs, ils soutinrent contre les musulmans plusieurs guerres très célèbres". (Ibn Khaldoun, 1999, opus cité, p. 177).
Plus près de nous, en 1931, l’historien anticolonialiste Charles-André Julien pouvait constater que : "Aujourd’hui, on ignore généralement que le Maroc, l’Algérie et la Tunisie sont peuplés de Berbères, que l’on qualifie audacieusement d’Arabes. Quant aux indigènes, ils se désignèrent souvent du nom d’Amazigh (Tamazight au féminin, Imazighen au pluriel) qui signifiait les hommes libres, puis les nobles et s’appliqua à plusieurs tribus avant l’occupation romaine" (C.-A. Julien, Histoire de l’Afrique du Nord, Paris, Payot, 1931, p. 2).
Actuellement, le lecteur exigeant, qui souhaite avoir l’avis de grands savants du domaine berbère, peut lire utilement L’Encyclopédie berbère, publiée en France avec le concours du Conseil international de la philosophie et des sciences humaines de l’UNESCO.
II - Le mouvement amazigh : brefs rappels historiques
A - l’époque coloniale ou les origines de la discrimination
En 1912, le Maroc est soumis officiellement au protectorat franco-espagnol, sous la demande du Sultan de Fès qui était assiégé, à l’époque, par des tribus berbères du Moyen Atlas. La France pénètre le Maroc pour protéger le Sultan de Fès et son entourage politique contre les populations berbères. La France coloniale déclare donc la guerre aux Berbères.
En 1914, la résistance armée berbère, sous le commandement de Muha Ou Hammou Azayi, emporte la bataille dite de Lehri.
En 1921, les forces berbères du Nord guidée par Mohammed Abdelkrim El Khattabi emportent la bataille la plus célèbre contre les troupes espagnoles. Ce qui permit la libération du Rif. Vaincus, les deux puissances protectrices du Sultan organisent leur riposte.
En 1926, le Maréchal Pétain, succédant à Lyautey, ordonne expressément la liquidation d’El Khattabi qui fut exilé sur l’Ile de la Réunion. Malgré cela, les Berbères persistent.
En 1934, dans le Sud Est du pays, l’armée française subit de nombreuses défaites. On retiendra la bataille de Badou qui vit les troupes de Assou Ou Bassalem triompher.
Signalons une nouvelle fois le parti pris du Sultan et de sa clientèle politique en faveur des puissances coloniales au bénéfice desquelles de véritables campagnes de propagande furent organisées dans les mosquées de Fès, notamment. On perçoit ici les origines de la discrimination qui frappera, dans le Maroc indépendant et administré par les descendants du Sultan, les populations berbères.
En 1930, le résident général de la France promulgue un dahir (un texte de loi) signé par le Sultan. Rappelons, pour mémoire, qu’à leur arrivée en Afrique du Nord, les Français ont été confrontés à différentes pratiques juridiques inconnues et distinctes des pratiques islamiques. Nous insisterons, avec Salem Chaker (Berbères aujourd’hui,page 64), sur le fait que "le droit coutumier berbère est une donnée objective des sociétés berbères ; il préexiste à l’arrivée des Français, qui ne l’ont pas crée comme on pourrait parfois le croire à lire la littérature nationaliste arabo-islamique". Ce "dahir berbère", texte de droit international privé qui ne dit pas son nom, tendait à l’application du droit coutumier berbère en matière pénale aux populations berbères. Il s’agit là, sans plus, d’un exemple du principe de la personnalité des lois. Les réactions que la promulgation de ce texte a suscité au sein des familles urbaines, traditionnellement liées au Sultan, méritent d’être analysées. En effet, de peur de voir les berbères s’imposer sur le terrain politique, les tenants de l’idéologie arabe évoquent le spectre de la division des maghrébins et s’insurgent contre ce qui fut qualifié de tentative de "christianisation" des Berbères. Ces réactions émanant des serviteurs du Sultan, sont hautement révélateurs de "la suspicion profonde et de l’illégitimité foncière dans lesquelles le nationalisme arabo-islamique a toujours tenu les Berbères" (voir Salem Chaker, Berbères aujourd’hui, page 65). Sur ce fondement, sera combattu toute référence au berbère. Nous y voyons également les sources de la discrimination que subiront les populations berbères après l’accession du Maroc à la souveraineté.
B - Les Berbères après l’indépendance : le mouvement amazigh
Nous allons nous borner à indiquer à titre indicatif, quelques unes des étapes les plus importantes (depuis 1990) de ce qui constitue le mouvement berbère. Mouvement berbère doit être entendu comme l’ensemble des faits qui s’inscrivent dans une démarche tendant à la reconnaissance par les autorités marocaines, de la chose berbère.
La monarchie marocaine, à l’instar du pouvoir algérien, affirme haut et fort l’arabité et l’islamité du Maroc. Seule la langue arabe bénéficie d’un statut et seule l’arabité et l’islamité sont citées dans les textes officiels de la monarchie marocaine depuis son existence.
En 1991, six associations marocaines ont rendu public un texte qu’elles ont adopté "Charte d’Agadir". Ce texte réclame la reconnaissance des langue et culture amazighes. Il formule ainsi un certain nombre d’autres revendications. Plusieurs associations ont été créées suite à cette charte.
En 1993, des associations amazighes rendent public un mémorandum par lequel elles soulignent la politique d’assimilation forcée pratiquée à l’égard des Imazighen ainsi que leur identité, culture et langue. C’était à l’occasion de la Conférence Internationale sur les Droits de l’Homme tenue à Genève.
En 1994, les associations se rassemblent pour créer une structure de coordination appelée Conseil national de coordination (CNC). Le mouvement a déjà compris qu’il y a intérêt à unir les forces et à coordonner les actions.
En mai 1994, sept militants de l’association Tilelli (Liberté) ont été arrêtés. Leur tort était de défiler le 1er mai avec des banderoles écrites en tifinagh (écriture berbère) et demandant l’enseignement de tamazight (langue berbère). Cet acte a été considéré par les autorités comme une atteinte aux valeurs de l’Etat ainsi qu’à l’ordre public. Leur arrestation a suscité une grande mobilisation à travers le Maroc mais aussi en France et en Kabylie. Cette mobilisation a contraint les autorités marocaines à les libérer.
En août 1994, Hassan II avait prononcé un discours par lequel il promettait l’enseigner des "dialectes berbères" dans les écoles marocaines. Ce discours est resté lettre morte.
Le mouvement associatif a vu un développement rapide et important puisqu’en l’espace de quelques années le nombre d’associations berbères s’est multiplié. Aujourd’hui, on dénombre pas moins de 48 associations berbères (voir Annexe 1., pp.16-17). Ces associations sont autorisées par les autorités marocaines. Car il faut rappeler que plusieurs associations n’ont toujours pas eu cette autorisation, ce qui ne leur permet pas de mener des activités. A ce propos, le gouvernement marocain déclare dans son rapport remis au CERD (CERD/C/430/Add. 1.) en juin 2002, au paragraphe 42, que seulement 18 associations existent au Maroc. Ne pouvant mettre cela sur le compte de l’ignorance, le gouvernement marocain donne une idée de la légèreté avec laquelle il traite la question berbère. D’ailleurs, dans son rapport au CERD (CERD/C/298/Add. 4) remis en décembre 1997, au paragraphe 81, le gouvernement marocain avait annoncé le même nombre d’associations berbère à savoir 18 ; comme si entre 1997 et 2002 le mouvement associatif berbère au Maroc n’a vu aucune évolution. D’ailleurs les paragraphes présentant la situation de la langue et de la culture berbères au Maroc sont pratiquement les mêmes dans les deux rapports !!
L’arrivée de Mohammed VI au pouvoir, après la mort de Hassan II, n’a rien changé concrètement à la question berbère. Dès son accession au trône, il se dit par-ci par là que ce "jeune roi" serait favorable à Tamazight et qu’il serait prêt à s’engager sur la voie d’une reconnaissance du berbère. Seulement, de nombreuses contradictions resurgissent dans le discours et les actes officiels. En effet, d’un côté, le palais affiche un intérêt au berbère notamment par la mise en place de l’Institut royal de la culture amazigh (l’IRCAM) en vertu d’un Dahir (équivalent d’une loi) du 17 octobre 2001. D’un autre, il n’hésite pas à user de méthodes outrancières pour museler les militants berbères à qui l’on interdit d’entreprendre toutes sortes de manifestations publiques sous peine de condamnations pénales.
PARTIE 2.
Principales violations de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale
I - La négation officielle et constitutionnelle du fait amazigh (berbère)
La discrimination anti-berbère est un fait officiel délibéré et organisé, inscrit dans la Constitution, qui bénéficie du concours des institutions de l’Etat lesquelles sont instrumentées dans le but de nier l’identité ancestrale des Berbères en vue de les arabiser par la force et de les intégrer ainsi dans une conception politique arabo-islamique comme dominés.
A - L’exclusion et la discrimination constitutionnelle
Rappelons la principale disposition du préambule de la Constitution sur lequel se base la politique d’arabisation et de négation de l’identité amazighe du pays. En effet, "Le Royaume du Maroc, Etat musulman souverain, dont la langue officielle est l’arabe, constitue une partie du Grand Maghreb Arabe" (Constitution du 13 septembre 1996).
Force est de constater qu’aucune place n’est accordée à la langue et la culture berbère dans les textes fondamentaux de l’Etat alors que le berbère est une langue vivante pratiquée par au moins 40% de la population marocaine. (En effet, d’après S. Chaker, éminent berbérologue, On compte "un pourcentage minimum de 40% de la population au Maroc, soit 9,5 millions de berbérophones sur une population de 24 millions. Ces chiffres sont des valeurs minimales que l’on peut considérer comme assurées : on ne peut exclure que les pourcentages soient en réalité nettement plus élevés et qu’ils puissent atteindre 50% de berbérophones au Maroc". Voir Salem Chaker, Berbères aujourd’hui, L’Harmattan, Paris, 1989).
Eu égard à ces dispositions, force est de croire que l’arabisation est omniprésente dans la mesure où l’arabe est considérée comme la seule langue nationale et officielle de l’Etat marocain. Quoi qu’il en soit, la langue berbère ne dispose d’aucun statut officiel. Ainsi, nous constatons non sans amertume que tout le fondement amazigh (berbère) du Maroc soit délibérément ignoré. Dès lors, c’est la majorité des marocains qui se trouvent exclus de jure, de l’Histoire. Ce traitement contraire à la lettre et à l’esprit de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale constitue une atteinte insupportable aux droits fondamentaux des Imazighen marocains contraints à une arabisation maintes fois oppressive.
B - Une arabisation oppressive
Les institutions de l’Etat sont les gardiennes de la Constitution. Ainsi, elles ont toutes été appelées en garantie par le gouvernement marocain pour la réalisation de l’arabisation, qui comme nous l’avons vu, constitue le socle identitaire et linguistique de l’Etat. En tout premier lieu, c’est l’administration et les services de police qui ont été mis à contribution. Citons quelques événements récents qui témoignent de ce que le mouvement amazigh, lancé pour la reconnaissance officielle de tamazight (berbère), fait l’objet d’une répression officielle sévère.
En 1994, lors de la commémoration du 1er mai à Goulmima (Sud Est marocain), des militants berbères ont défilé avec des banderoles écrites en tifinagh (alphabet berbère) revendiquant la reconnaissance officielle des langues et culture berbères. Deux jours plus tard, le 3 mai 1994, sept d’entre eux sont arrêtés sur ordre du gouverneur de la province. Après perquisition de leurs domiciles, sont jetés en prison. Ils devaient, en effet, répondre des chefs d’inculpation suivants : "atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat", "incitation au dépassement des institutions" et "atteinte à la Constitution". Le 9 mai 1994, ils sont présentés devant la Cour d’Errachida. Le collectif de 74 avocats qui s’est spontanément formé demande leur libération sous caution. La demande est refusée, le procès reporté au 17 mai 1994. Les sept détenus entament avec succès une grève de la faim afin que leur soit accordé le statut de prisonniers politiques. Le 17 mai, le procès a lieu. Durant l’instance, les détenus ont catégoriquement refusé de s’exprimer en arabe. Le verdict, prononcé le 27 mai, prononce trois peines de prison et de lourdes amendes. A la suite d’une mobilisation massive du mouvement berbère, des organisations des Droits de l’Homme, les trois détenus politiques ont été libérés le 3 juillet et amnistiés par la Grâce Royale. Seulement, à la suite de leur libération, les autorités administratives ne leur permettent plus d’exercer leurs métier d’enseignants et ce, bien qu’amnistiés.
Notons aussi que le contexte du procès des détenus de Goulmima dont nous venons de voir la trame, a été l’occasion aux autorités marocaines d’interdire en vain de nombreuses activités associatives marocaines notamment celles de l’AMREC et d’ILMAS, comme le rapporte un communiqué du Comité de solidarité avec les détenus de Goulmima daté du 28 mai 1994. Ajoutons que les autorités se sont à de nombreuses reprises illustrées dans l’interdiction des activités relatives à la question amazighe (berbère). On citera à titre d’exemple l’interdiction, parmi de nombreuses autres, faite aux étudiants de la faculté des Lettres de Meknes de disposer des locaux universitaires afin de réaliser débats et manifestations culturelles. Cet épisode a déclenché le 23 novembre 2000 une grève de protestation dirigée par les étudiants de la même faculté. Lorsque les autorités ne gênent pas les activités des associations amazighes (berbères), elles se distinguent à en bloquer jusque la naissance juridique. Ainsi, TADA (Coordination nationale des associations culturelles amazighes du Maroc) créée le 5 février 2000 à Meknes s’est systématiquement vue refusée la délivrance de l’agrément administratif justifiant de la personnalité morale. Un communiqué de la même Coordination (TADA) daté d’avril 2002 signale cette situation.
Récemment, les opinions de certains militants berbères ont valu à ces derniers moult tourments. L’administration marocaine a une nouvelle fois pris pour cible les mêmes activistes qu’elle a incarcéré en mai 1994, preuve que le gouvernement entend combattre minutieusement toute manifestation berbère. Ainsi, le mercredi 29 août 2001, les autorités provinciales d’Errachidia ont fait savoir à deux militants qu’il leur est dès lors interdit d’organiser toute manifestation publique sous peine d’une condamnation pour trahison. En effet, une manifestation était prévue dans le chef-lieu de région en soutien aux Imazighen de Kabylie (Algérie) qui, à ce moment même, subissaient une des plus dures répression qu’ils n’ont connu à ce jour.
Relevons aussi que l’administration semble s’opposer à la commémoration de tout événement en marge de ceux célébrés officiellement. A cet égard, les autorités provinciales de Boumalne n Dadès (Ouarzazate) ont interdit à l’Association AZEMZ de célébrer le nouvel an berbère prévu le 12 janvier 2003. Les motifs invoqués paraissent inadaptés. Tels ont été les motifs de l’administration : 1/ l’association AZEMZ doit rénover son bureau et cela même si c’est une affaire interne à l’association ; 2/ aucune association ne célèbre cette fête dans toute la région sauf l’association AZEMZ.
La toponymie aussi n’est pas à l’abri de cette politique d’arabisation. Ainsi plusieurs toponymes berbères ont subi des déformations leur donnant des formes arabes quand ce n’est pas une arabisation complète. A titre d’exemple, "Ifni" devient "Sidi Ifni", "Askourene" devient "Sekkoura", "Tadla" devient "Qasba Tadla", "Tazagourt" devient "Zagoura", "Aharmemou" devient "Ribat elkheir", "Imteghren" devient "Errachidia",....
Les activités artistiques spécifiquement berbères sont marginalisées par l’Etat marocain. A aucun moment la modernisation des arts berbères dans les différents doimaines (littérature musique, danse, architecture, décoration,...) n’a été envisagée par les autorités marocaines. Les artistes berbérophones sont victimes d’une véritable discrimination par les autorités marocaines dans la mesure où ils ne bénéficient pas des mêmes avantages matériels et moraux que leurs homologues arabophones.
Enfin, comment omettre de préciser l’interdiction formelle de l’usage des prénoms amazighs par les services administratifs municipaux. Cette discrimination s’inscrit dans cette politique linguistique autoritaire qui ne reconnaît que l’arabe comme langue nationale et officielle. Selon des témoignages, en 1998, à Goulmima, les autorités locales auraient interdit le prénom "Dihia". En 1999, à El Housseima, le prénom "Noumidia" a également connu le même sort.
Ceci étant précisé, il n’empêche pas moins, que le gouvernement prenne des mesures tendant à une "reconnaissance" très fébrile de Tamazight (culture et langue berbère). En fait, il ne s’agit que de réponses biaisées aux questions posées par le mouvement amazigh.
II - Les réponses officielles biaisées
Le caractère dilatoire des réponses données par le Maroc aux attentes, qui paraissent pour autant légitimes, des Berbères marocains ne cessera d’être relevé. Car, dans certaines hypothèses, il arrive, que la reconnaissance de ce que les autorités marocaines qualifient de "dimension amazighe" reste purement tactique et contextuelle, liée à des conjonctures électorales si ce n’est pour permettre l’amorce d’une nouvelle technique d’arabisation laquelle serait exécutée avec plus de subtilité et de douceur.
A - L’introduction du berbère dans le système éducatif
Il est un fait. Le Maroc doit être crédité de ce que jusqu’à une période récente il soit le seul pays d’Afrique du Nord à accorder une place non négligeable aux études berbères. Cependant, cette place accordée aux études berbères n’est en rien officiellement consacrée. Au contraire, rien ne la permet et presque tout ce qu’il y a d’officiel l’interdit. Dans tous les cas, le berbère est considéré comme un objet d’érudition qu’il faut déconnecter de la société. Le cantonner aux recherches universitaires procède de cette visée.
Retenons particulièrement notre attention sur la Charte nationale de l’éducation et de la formation d’octobre 1999 dont les termes semblent être repris par le rapport du gouvernement marocain (voir rapport marocain CERD/C/430/add.1 - paragraphe 40). Cette charte précise sous un titre intitulé "ouverture sur le berbère" (voir paragraphe 115) que, notamment, les autorités éducatives régionales ont la possibilité de choisir l’utilisation du berbère ou de tout autre dialecte local pour accompagner et faciliter l’enseignement de la langue officielle dans le cadre des études primaires. On l’aura compris, cette disposition qui semble tolérer l’enseignement du berbère ne cache pas moins les objectifs officiels d’un tel enseignement. En effet, sans vouloir tomber dans les excès elliptiques des slogans, on se permettra de voir ici l’expression d’une "arabisation en tamazight". Ainsi, bornée aux classes du premier cycle de l’école fondamentale, cette introduction du berbère dans le système éducatif ne doit pas être perçue comme une reconnaissance du berbère. Au contraire. Car, si il y avait une reconnaissance stricto sensu, l’enseignement du berbère concernerait l’ensemble des niveaux scolaires ; de plus, cet apprentissage est borné à permettre d’amorcer la formation à l’arabe. Ainsi, la langue berbère n’est traitée que comme l’outil pédagogique et non l’objet d’enseignement. Même la création de L’Institut royal pour la culture amazigh (IRCAM) ne permet pas de conclure autrement.
B - L’IRCAM : pour un freinage en douceur du mouvement amazigh
La création de l’IRCAM, faite en grande pompe par un discours de Mohammed VI prononcé lors du scellé du Dahir (norme équivalent à une loi) le 17 octobre 2001, est un fait remarquable dans la politique linguistique du Maroc. On aura parlé d’un véritable revirement à la faveur du berbère. Ces propos ne sont cependant que de lénifiantes palabres lancées aux autorités. Le caractère "révolutionnaire" apposé à cet Institut mérite d’être à juste titre contesté. Car la création d’une telle institution n’est pas la réponse adaptée aux attentes du mouvement berbère marocain. Parce qu’en somme, au lieu d’accorder une véritable officialisation et légalisation de tamazight (langue, identité et culture berbère), l’Etat procède à une "reconnaissance" juste assez pour ne pas être carrément folklorique et vraiment dérisoire pour ne pas être sérieuse. En proposant la création de l’IRCAM, le Maroc a opposé au mouvement berbère marocain ni plus ni moins que l’argument de l’anti-constitutionnalisation alors qu’en revanche, une révision de la loi fondamentale du Pays est attendue depuis longtemps. Seulement, même s’il est tenu, dans biens des cas, par le lien vassalique, le mouvement berbère n’est pas dupe. Il souhaite fortement que la création de l’IRCAM soit suivie de mesures visant à consacrer réellement le berbère dans la légalité marocaine. A ce propos, le comité du manifeste amazigh, dans un communiqué en date du 31 juillet 2002, relatif au discours du trône, "souhaite que cette sage initiative soit suivie d’une reconnaissance au niveau constitutionnel du caractère national et officiel de la langue amazighe et de la satisfaction des autres revendications du Mouvement Amazigh figurant dans le Manifeste Amazigh". Enfin n’est-il pas logique de croire qu’un enseignement en bonne et due forme ne soit délégué non à un institut ad hoc mais davantage placé sous la charge du Ministère de l’Education nationale ?
C - l’adoption de l’alphabet tifinagh : une arme pointée contre la langue berbère elle-même ?
Chargé d’introduire la langue berbère dans le système éducatif marocain, l’IRCAM vient de trancher la question de la graphie usuelle du berbère. Rappelons, pour mémoire, que cette question a suscité de nombreuses controverses dans le champ berbère. Trois types de notations ont été proposées : l’écriture latine, l’écriture arabe et l’écriture tifinagh (alphabet proprement berbère datant de plus de trois mille ans). Les suffrages de l’IRCAM sont allés au bénéfice de la notation traditionnelle berbère, le tifinagh. Cette décision, aussi satisfaisante soit-elle sur le plan symbolique, constitue, à la vérité, une arme redoutable pointée en direction de la langue berbère elle-même. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, nous pensons que l’adoption des caractères Tifinagh pour la transcription du berbère est un moyen dont se dotent les autorités pour neutraliser le développement et le rayonnement de la langue berbère. Pour de nombreuses raisons.
Premièrement, il convient de signaler que l’utilisation de la transcription tifinagh soulève de nombreux problèmes techniques. En effet, il existe pas moins de huit variantes de l’alphabet tifinagh. Or, l’IRCAM ne semble pas avoir tranché la question de savoir quel tifinagh adopter. Par conséquent, le tifinagh doit faire l’objet d’un réaménagement qui, pour l’instant, n’est pas à l’ordre du jour.
Deuxièmement, le choix de la graphie tifinagh a pour principal effet de retarder si ce n’est de compromettre l’introduction de la langue berbère dans le système éducatif. Car, pour l’heure, la totalité des travaux universitaires relatifs à la langue berbère ont été menés sur la base de la transcription latine. Et au surplus, l’ensemble des outils pédagogiques existant (dictionnaires, grammaires etc.) sont rédigés en caractères latins. Dès lors, l’exploitation de ces documents nécessite leur retranscription préalable en tifinagh. Ainsi, c’est l’enseignement de la langue qui semble par la même reconduit à une échéance inconnue faute d’instruments adaptés.
Au terme de ces quelques constatations nous arrivons à la conclusion selon laquelle l’adoption du tifinagh, eu égard aux insuffisances techniques qui le caractérisent, en plus d’être un moyen d’éviction des acquis des études berbères marocaines, constitue un procédé des plus sournois visant à compromettre l’enseignement effectif de la langue berbère sinon à le rendre impossible.
Partie 3.
Nos propositions pour l’élimination des discriminations officielles
Aux côtés du mouvement berbère marocain, nous demandons au Maroc la reconnaissance de tamazight comme langue nationale et officielle pour qu’à terme, le fait amazigh regagne toute la souveraineté qui est la sienne.
Le mouvement berbère marocain a eu déjà à formuler un certain nombre de revendications et de propositions à l’Etat marocain qui sont exprimées dans différents documents et déclarations : - Charte d’Agadir (1991) ; - Mémorandum pour les droits culturels et linguistiques des Imazighen (1993) ; - Le Manifeste amazigh (2000).
De façon toute à fait indicative, nous suggérons un certain nombre de mesures que l’Etat marocain doit prendre pour montrer sa volonté d’en finir avec la négation discriminatoire qu’il fait subir aux Berbères et à leurs langue et culture.
1- Le gouvernement marocain doit mettre en œuvre des lois rendant obligatoire l’enseignement de la langue berbère à tous les niveaux (écoles, collèges, lycées, universités et établissements assimilés). L’enseignement de la langue berbère doit s’effectuer dans un système laïc et gratuit. Le gouvernement doit assurer les moyens permettant l’élaboration des outils pédagogique dont la langue berbère a besoin.
2- Le Gouvernement marocain doit procéder à une refonte sérieuse des programmes d’histoire en vigueur dans les établissements scolaires. Les programmes actuels sont une véritable falsification de l’histoire du Maroc.
3- Le gouvernement marocain doit créer une chaîne de télévision ainsi que des radios locales et régionales en langue berbère. Les Berbères doivent bénéficier des médias publics au même titre que les autres citoyens marocains.
4- La création par l’Etat d’un corps d’interprètes appelés à exercer dans les administrations publiques, les tribunaux et les hôpitaux. Leur rôle est d’aider les berbérophones à se faire comprendre, à effectuer leurs démarches administratives, à se faire soigner,... Aujourd’hui, des centaines de milliers de citoyens au Maroc renoncent à faire des démarches, à porter plainte,.. pour des raisons d’ordre linguistique.
5- L’annulation immédiate de la circulaire ministérielle (98-99) du Ministère de l’Intérieur établissant une liste des prénoms acceptables par les services municipaux privant ainsi les Berbères de donner à leurs enfants des prénoms amazighs (berbères) et qui ne figurent, bien entendu, pas dans la liste du Ministère de l’Intérieur qui suggère des prénoms arabo-musulmans.
6- L’Etat marocain doit assurer aux activités artistiques berbères la place qu’elles méritent. Il doit mettre les moyens nécessaires en vue de la modernisation des arts berbères dans le domaine des lettres, du chant, de la musique, du cinéma, du théâtre, de la danse, de l’architecture, de la décoration,... L’Etat marocain doit permettre aux artistes berbérophones de bénéficier des mêmes avantages matériels et moraux que leurs homologues arabophones.
7- Le Gouvernement marocain doit veiller à ce que les responsables au sein de l’Administration marocaine cessent de déformer ou d’arabiser de façon autoritaire les toponymes berbères.
8- L’Etat marocain doit doter les associations culturelles berbères de subventions leur permettant d’effectuer leur travail dans les meilleurs conditions.
9- L’Etat marocain doit accorder aux publications s’employant à défendre le patrimoine culturel amazigh les mêmes aides financières accordées aux autres publications paraissant en langue arabe.
10- Le gouvernement marocain doit cesser d’empêcher les associations berbères d’organiser librement des activités culturelles. Il doit laisser la liberté aux citoyens de créer des associations culturelles berbères.
11- Le gouvernement marocain doit mettre en place un programme adéquat de développement économique des régions marginalisées, qui se trouvent être pour la plupart berbérophones.
12- L’Etat marocain doit procéder au rapatriement du corps du symbole de la résistance berbère Mohamed Abdelkrim El Khattabi, enterré en Egypte, pour qu’il rejoigne son village natal Ajdir dans le Rif.
Références bibliographiques
– Salem Chaker, Berbères aujourd’hui, L’Harmattan, Paris, 1989.
– Ibn Khaldoun, Histoire des Berbères, Geuthner, Paris, 1999.
– Charles-André Julien, Histoire de l’Afrique du Nord, Payot, Paris, 1931.
– Abdellah Bounfour, Le nœud de la langue, Edisud, Aix-en-Provence, 1994.
– Mestafa Qadiri, L’Etat national et les Berbères : le cas du Maroc, mythe national et négation nationale, thèse de doctorat en sciences politiques, Montpellier VI, 1994.
– Hassan Aourid, Le substrat culturel des mouvements de contestation au Maroc. Analyse des discours islamiste et amazighe, Thèse de Doctorat d’Etat, Rabat, 1999.
– Ahmed Boukous, Langage et culture populaire au Maroc, Rabat, 1977.
– Ahmed Boukous, Société, langues et cultures au Maroc. Enjeux symboliques, éd. Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, rabat, 1995.
– Gilbert Granguillaume, Arabisation et politique linguistique au Maghreb, Maisonneuve & Larose, Paris, 1983.
– Mohamed Chafiq, Le Manifeste berbère, Mars 2000.
– Encycloplédie berbère, Edisud, Aix-en-Provence.
– Annuaire de l’Afrique du Nord, Aix-en-Provence.
ANNEXES
Annexe 1.
Liste partielle d’associations berbères au Maroc
1- AMREC (Rabat)*
2- Association Abrid (Fès)
3- Association Abrid Ameqran (Tinejdad, Goulmima)
4- Association Addur Imazighen
5- Association Agraw Amazigh (Rabat)
6- Association Akabar (Aghbalou n-iserdan)
7- Association Alhiwar Attaqafi (Nador)
8- Association Amenzu (Khenifra)
9- Association Amghar (Khenifra)
10- Association Anaruz n Demnat (Demnat)
11- Association Andaz (Lhajeb)
12- Association Anezwum (Azerou)
13- Association Aourir (Agadir)
14- Association Asafar (Melaab, Errachidia)
15- Association Assid (Meknès)
16- Association Azemz (Boumalen Dades, Ouarzazate)
17- Association Azghenghen (Nador)
18- Association Bouya (Al Hoceima)
19- Association culturelle Anoukour (El Hoceima)
20- Association culturelle Asenflul (Meknès)
21- Association culturelle Asirem (Rissani, Errachidia)
22- Association culturelle Azekka (Azilal)
23- Association culturelle Ilmas (Nador)
24- Association culturelle Souss (Casablanca)
25- Association Fazaz (Fès)
26- Association Ighbula (Meriret, Khenifra)
27- Association In Umazigh (Nador)
28- Association Izuran (Ouarzazate)
29- Association Izuran n Tamunt (Souk Arbaa)
30- Association Lekhrebat (Tinejdad, Goulmima)
31- Association Massinissa (Tanger)
32- Association Numidia (El Hoceima)
33- Association pour la Recherche Culturelle et Educative (Biougra, Agadir)
34- Association Tafsut (Tarrast, Agadir)
35- Association Taltefraout (Goulmima)
36- Association Tamaynut (Rabat)*
37- Association Tamesna (Casablanca)
38- Association Tanukra (Nador)
39- Association Tidukla (El Jadida)
40- Association Tifssa (Aïn Louh)
41- Association Tilelli (Goulmima)
42- Association Tiwiza (Agadir)
43- Association Tizi (El Hajeb)
44- Association Toudert (Errachidia)
45- Association Université d’Eté d’Agadir (Agadir)
46- Association Yugurtha (Oujda)
47- Association Tazelgha (Lkhorbat, Tinejdad)
48- Association Tifinagh (Rabat)
(*) Les associations AMREC et TAMAYNUT sont les deux plus anciennes associations berbères au Maroc, elles ont leurs sièges centraux à Rabat. Mais il y a quelques dizaines de sections implantées à travers le pays qui sont affiliées à ces deux associations.
Ces associations sont une partie des associations ayant obtenu des autorités administratives les autorisations.
Annexe 2.
Communiqué de MM. Hamid Lihi et Ali Harcherras, militants de l’association Tilelli (Goulmima) qui étaient victimes des intimidations des autorités administratives marocaines en 2001.
COMMUNIQUE
Nous, Hamid LIHI et Ali HARCHERRAS, citoyens marocains, militants du Mouvement Culturel Amazighe et membres de l’association socioculturelle TILELLI à Goulmima :
– Informons l’opinion publique nationale, amazighe et internationale que les autorités provinciales d’Errachidia, qui nous ont convoqués le mercredi 29 août 2001, nous ont notifié que nous sommes "interdits d’entreprendre toute sorte de manifestation publique, sous peine d’être poursuivis pour trahison", en nous rappelant les évènements qui ont secoué la région depuis l’indépendance, notamment l’affaire Addi Ou Bihi en 1957 et l’épisode de 1973,
– Considérons cette forme d’interdiction anticipée, fondée sur un jugement d’intentions, comme une atteinte grave à nos droits civiques et politiques, garantis, pourtant, par la Constitution et le code des libertés publiques,
– Appelons les citoyens épris de justice et les organisations des Droits Humains à nous soutenir et à dénoncer ces agissements intimidants des dites autorités, qui privent des citoyens de leurs droits de manifestation et d’expression,
– Exprimons notre gratitude à la population de la région pour le soutien qu’elle nous a apporté dans cette épreuve,
– Réaffirmons notre détermination à continuer notre combat jusqu’à satisfaction des revendications légitimes de notre région et du Mouvement Culturel Amazighe.
Goulmima, le 4 septembre 2001
Hamid LIHI
Ali HARCHERRAS
Annexe 3.
Communiqué de l’association Azemz (Boumaln Dades, Ouarzazate) suite à l’interdiction qui leur a été signifiée par les autorités marocaines de célébrer le nouvel an berbère.
Association Azemz
Boumaln Dadès - Ouarzazate
COMMUNIQUE
Au moment où tous les Imazighens dans le monde entier se préparent à célébrer le nouvel an amazigh 2953, à Boumalne Dades, l’association socioculturelle et sportive AZEMZ a été surprise par l’interdiction de son activité prévue pour cette célébration par le délégué provincial de la jeunesse en collaboration avec les autorités locales de Boumalne de Dades, selon une lettre adressée à l’association par le directeur de la maison des jeunes.
Pour cela nous informons l’opinion publique nationale et internationale ce qui suit :
– Nous dénonçons ces actes inacceptables auxquels les responsables doivent mettre fin.
– Nous assumons aux autorités locales et provinciales les conséquences de cette répression.
– Lever l’embargo économique et culturel sur la région de Dades.
– Nous réaffirmons une autre fois notre attachement aux revendications légitimes du Mouvement Culturel Amazigh (MCA).
– Constitutionnaliser la langue et la culture amazighes et adopter le caractère latin comme notation convenable pour tamazight.
– Mettre fin à l’interdiction des prénoms Amazighes.
– Notre soutien absolu aux délégués de laarouch en Kabylie.
le président de l’association AZEMZ
Boumaln n Dades, le 10 janvier 2003.