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Hacène Ahres perpétue la tradition de l’amour déchu
dimanche 6 août 2006, par
Hacène Ahres reste, vingt ans après ses débuts dans la chanson, plus que jamais fidèle à son style et à ses thématiques. Fils de poète, Hacène a hérité de son père la sensibilité à la beauté du verbe, aux tournures linguistiques bien ciselées. Chez lui, les vers servent à exorciser le mal sous toutes ses formes, que ce soit le mal d’amour ou la douleur ressentie pour un pays qui va mal et n’arrive pas à trouver ses marques. Ses débuts dans la chanson dans les années quatre-vingts annonçaient déjà un chanteur de l’amour déchu.
Le thème de l’amour déçu/déchu est universel, il existe dans toutes les littératures. L’être humain chante ses déboires amoureux depuis jadis. Dans la littérature kabyle, Si Mohand reste le poète qui a le plus dit ses déceptions affectives. Son verbe s’est tellement propagé dans la société kabyle que les autres poètes se sentaient redevables envers lui. Témoignent les schémas formels de la poésie kabyle qui ont, pendant très longtemps, été la copie conforme de la sienne. Sur le plan thématique, une sorte de tradition est née à sa suite : celle de l’ash’issef en amour. C’est l’équivalent sémantique du regret. Poétiquement, il se traduit par des vers sous forme de plaintes. Les genres poétiques féminins comme l’ah’ih’a ou l’acewwiq ont traditionnellement porté cette thématique.
La chanson kabyle a naturellement prolongé la tradition. La poésie amoureuse de Matoub Lounes porte une empreinte très marquée de la désillusion Et des douloureux déchirements du sujet. Sur le même sillage Hacène Ahres a fait de sa poésie un voyage sur le chemin de l’amour déchu. Un voyage qui dure encore. Témoigne son dernier album sorti il n’y a pas longtemps.
Qqim d ah’ulfu : quête de l’amour absolu comme thérapie
Le dernier album de Hacène Ahres n’est pas très différent des précédents. Le chanteur reste fidèle à ses thématiques et à son style musical. Ce dernier s’est étoffé par de nouvelles sonorités introduites par le musicien Bazou qu’on peut qualifier sans hésiter de virtuose. Sa touche fait éviter à l’ouvrage de Hacène Ahres beaucoup des imperfections rencontrées dans les précédents produits. L’introduction du piano et l’utilisation de violons en série adoucissent davantage les mélodies. On se régale à les écouter.
"Qqim d ah’ulfu", la chanson qui donne son nom à l’album, est construite sur le mode dialogique. Le sujet interpelle un énonciataire virtuel qui n’est autre que sa bien-aimée, celle que le temps a éloignée. Eloignée, certes, mais le poète la convoque à la surface de son poème et lui donne une présence plus forte que l’absence. Pour mieux apprécier cette présence, cette chanson et tout l’album, vous savez quoi faire !
Allez, pour ne pas vous laisser sur votre faim, voici la chanson Qqim d ah’ulfu ! Bonne écoute !
Amar Ameziane
Ceci n’est pas un compte-rendu, c’est juste un avant-goût...
Messages
1. Hacène Ahres perpétue la tradition de l’amour déchu, 6 août 2006, 11:54, par Un abonné aux gazettes des amours contrariées
Je n’ai jamais entendu parler d’amours déchues. Amour déçu oui mais déchu c’est la première fois. De quoi, un amour frustré, un amour revenu bredouille de ses rêveries, de ses convoitises et de ses espérances, serait-il déchu ? L’amour, lorsqu’il a oublié de planter sa flèche dans la personne qu’il nous a fait aimer, quelque amère soit la rancoeur qu’il verse dans nos coeurs, nous prépare à mieux apprécier le bonheur de l’amour partagé. Il prépare notre prochain embrasement en même temps qu’il éteint le précédent avec nos larmes. La déception de l’amour est un couronnement, non une déchéance. L’expérience d’un coeur, attendri et conquis par l’amour, malmené par un autre coeur, dur celui-là, indifférent et méprisant, est une expérience qui fait trouver le chemin de l’amour absolu dans le labyrinthe des sentiments superficiels et hypocrites. Peut-on appeler déchéance cette petite contrariété, certes déprimante et douloureuse, qui est en fait un ascenseur par lequel nous nous élevons vers le septième ciel pour devenir les égaux d’Eros et de Vénus, ces dieux farceurs qui nous ont tourmentés en ratant leur deuxième cible ? Que Perdons-nous à devenir des dieux et des déesses de l’Amour ?
1. Hacène Ahres perpétue la tradition de l’amour déchu, 7 août 2006, 21:39
Au delà de cet avis qui reste celui d’un "abonné aux gazette des amours contrariés"...si vous examiniez les textes poétiques de Hacène Ahres (de même que ceux de Matoub Lounes), vous verriez que c’est effectivement la sémiotique de la déchéance qui s’y déploie. L’article n’a pas pour objectif de susciter des réactions d’ordre subjectif, mais d’ordre purement littéraire. Il ne s’agit pas de deviser sur le sens de l’amour- chacun lui donnera le sens qu’il veut- mais d’amorcer ce qui, dans d’autres cultures, s’appelle des débats littéraires. Je vois que nous sommes loin, malheureusement.
2. Hacène Ahres perpétue la tradition de l’amour déchu, 8 août 2006, 11:33, par Quequ’un qui vient de résilier son abonnement.
J’ai l’impression que c’est l’auteur lui-même qui m’a fait cette réponse. Le débat, quelqu’il soit, littéraire, philosophique, politique ou autre, pour être fructueux et enrichissant nécessite qu’il soit mené dans le respect et surtout qu’il soit purgé de toute susceptibilité. Ce que vous avez pris pour une attaque contre votre personne ou votre article s’adressait en fait à tous ceux qui refusent de voir dans la déception de l’amour une sanctification du coeur déçu, une expérience qui assagit et qui fait éviter à l’avenir les écueils des amours légères et non partagées. J’aurais préféré que vous me reprochiez le fait de citer Eros et d’associer un dieu de la mythologie greque à une déesse romaine ; vous m’auriez invité à un réel débat littéraire. Ce que vous appelez la sémiotique de la déchéance en linguistique, nous l’appelons, en littérature le champs lexical de la déchéance. Si vous voulez une réaction littéraire à l’amour déçue, je vous conseille de lire la Nuit d’octobre d’Alfred de Musset. Peut-être y trouverez-vous, à travers les répliques de la muse et en plus clair, les idées que j’ai exprimées confusément. Sans rancune.
3. Hacène Ahres perpétue la tradition de l’amour déchu, 8 août 2006, 20:55
Je vous remercie pour votre message et salue votre érudition. Pour vous témoigner à mon tour que je n’ai pas de rancune, je vous promets de lire "la nuit d’octobre" d’Alfred de Musset incessamment.
A.Ameziane
4. Hacène Ahres perpétue la tradition de l’amour déchu, 9 août 2006, 18:42, par Massinissa seg Aazzugen
Je suis d’accord avec vous. Il est important que le debat soit contradictoire, mais on fait l’apprentissage de tout, quand à moi j’aime bien ce chanteur mais celui que j’aime par dessus tout c’est Brahim SACI, je l’ai entendu à la chaine 2 hier le 8/07/06, en direct de l’hotel Tamgout, c’etait vraiment super. Bref, il est important de communiquer sans se blesser en donnant des avis. Vives TAMAZGHA et tous les imazighen. Bravo pour ce site je viens souvent on y trouve des infos.. Tanmirt !
5. Hacène Ahres perpétue la tradition de l’amour déchu, 12 août 2006, 02:33, par un Kabyle de france
Décidément, il n’y a que toi, M. Ameziane, qui nous permets, à nous autres ‘immigrés’, d’écouter quelques chansons d’albums que nous recherchons ici, mais en vain. Grâce à toi, j’ai pu écouter deux chansons du dernier album de Si Moh, et maintenant, le tire phare du dernier album de Hacene Ahres. En consultant ce site, je me suis rendu compte que tu t’intéresses également à d’autres chanteurs, tels que Brahim Tayeb ou Ait Menguellet. Bref, nous avons les mêmes goûts. Il y a, par ailleurs, un chanteur, qui, pour moi, émerge dans la chanson kabyle : Zedek Mouloud. A moins que ce ne soit déjà fait, je te propose d’écouter son dernier album, et en particulier le titre « Din Din ». Entre rêve et réalité, c’est un pur événement poétique. Peut-être que cela te donnera une idée pour écrire quelque chose là-dessus.
Revenons à l’autre ’intervenant sur ce forum qui dit ne jamais avoir entendu parlé d’amours déchues ou d’amour déchu, comme on veut. Et bien cher Monsieur, vous n’en avez peut-être pas entendu parlé, mais ce n’est pas pour autant qu’il n’existe pas (mettons le mot au singulier). Comme le souligne très bien M. Améziane, l’intérêt de la réflexion qu’il a émise aurait été de provoquer un débat d’ordre littéraire. J’entend par là, l’évaluation des qualités artistiques de ce texte : le choix des structures, du lexique, des images, quel rapport y a-t-il entre telle tournure de phrase et telle image, quel rapport y a-t-il entre cet album et les précédents, entre les textes/musiques de Hacene Ahres et ceux (celles) des autres chanteurs.
Maintenant, cet intervenant veut nous faire croire qu’il n’y a pas de déchéance, après une déception amoureuse. Cela relève simplement d’un non sens. Peut-être, parlez d’un cas en particulier (ce qui me semble être justement le cas).Dans cette hypothèse, soit qu’il n’y a pas véritablement d’amour, puisque, pour reprendre vos mots, on ne ressent qu’une « petite contrariété », soit que cet amour est pleinement consommé, donc il n’y a pas déception. (ne me dites pas que l’amour ‘consommé’ n’existe pas non plus). Ce à quoi je veux en venir, c’est la relativité et la subjectivité dans les sentiments, comme le signale M. Améziane. Les expériences des uns ne sont pas celles des autres. Or, vous semblez vous inspirez d’un grand auteur, mais cet homme reste un humain avant tout, si génial, si cultivé soit-il. Je veut dire par là, qu’il n’y pas de « vade-mecum de l’amour ».
Aussi, il me semble bien que les déceptions amoureuses ne font pas monter ceux qui les vivent au septième ciel, mais elles leurs font connaître des décentes aux enfers. Vous voyez que tout est relatif. Quant à l’idée que vous avancez, et selon laquelle un amour déçu nous prépare « au bonheur de l’amour partagé », et bien non, l’amour déçu ne prépare rien, rien du tout. Il n’y a pas, me semble-il, de leçon à tirer, parce même l’amour suivant peut finir comme le précédent. Vous pouvez le prévenir vous ? Comment ? Quand ? Si c’est au début, alors il n’y a pas d’amour ; si c’est au milieu, il peut- être déjà trop tard. Alors, moi je dis que la déchéance après une déception amoureuse, cela existe et continuera à exister. Par contre, si votre but n’est autre que poser quelques « petites contrariétés » aux personnes qui essayent d’initier des débats sur notre patrimoine culturel, je vous invite Monsieur, à laisser les gens travailler. Encore une fois, merci à Mass Améziane, et j’attends quelque chose sur le magnifique album de M. Zedek. Jugurta
6. Hacène Ahres perpétue la tradition de l’amour déchu, 12 août 2006, 14:30
L’amour serait déchu s’il perdait de son pouvoir de reconquérir le coeur de l’amoureux éconduit. Or c’est toujours l’amour qui guérit les maux causés par l’amour, et c’est l’amour qui console de l’amour perdu. J’ai connu les enfers et toutes les peines que cause un amour qui nous renvoie non toute la félicité que nous en attendons mais la souffrance déprimante et handicapante qui nous semble un traitement injuste surtout lorsque nous nous remémorons tous nos bons sentiments et tous les bienfaits quet nous aurions prodigués à la personne qui nous a signifié son refus. Le pouvoir de l’amour quant à lui ne diminue en rien face au malheur de l’amoureux éconduit ou non agréé. Quand j’ai déclaré que l’amour déçu sanctifie le coeur et fait de nous des dieux, j’ai voulu dire que cette expérience nous rend aptes à susciter un amour partagé et à garder l’amour de la personne que nous avons aimée. Le coeur devenu un lieu saint interdit son accès à l’amour illusoire. Vous m’accusez à tort de saboter le travail de Améziane d’autant plus que je ne lis que les articles dont je respecte et admire l’auteur. Je pense au contraire que l’auteur de l’article a toutes les raisons d’être satisfait car il n’y a que l’indifférence des autres qui déplait à une personne entreprenante et agissante. L’expression des émotions et des sentiments font partie du domaine de la littérature ou alors apprenez-moi, s’il vous plait, les thèmes exclusifs sur lesquels, selon vous, doit porter un débat littéraire. Le résultat de votre accusation m’a fait prendre la décision de ne plus lire, de ne plus commenter ou réagir aux textes publiés sous la signature de Monsieur Améziane pour vous prouver que je n’ai rien contre lui. En ce qui me concerne je préfère la personne qui m’apporte sa contradiction franche et désintéressée à celle qui me donne son assentiment hypocrite et cupide.