
Tamazgha.fr : Le président de la République française, Emmanuel Macron, a convoqué le 25 juillet 2017 à La Celle Saint-Cloud, en Région parisienne, Sarraj qui se présente comme "le Président du Conseil présidentiel du Gouvernement d’entente nationale" et Khalifa Hafter qui se présente lui comme "le commandant de l’armée nationale libyenne" pour trouver une solution à la crise libyenne.
Que pensez-vous de ce qui est sorti de cette réunion et de la déclaration conjointe rendue publique à l’issue de la réunion ?
HCAL : La réunion a été une forme de publicité médiatique pour maintenir ou fructifier une relation avec d’autres pays qui interférent dans les affaires intérieures libyennes et une tentative de légitimer les milices ethniques et terroristes.
M. Sarraj est venu à la présidence du gouvernement illégalement, ce qui a aggravé encore la crise politique en Libye. Quant à Hafter, il s’agit d’un militaire qui a un sinistre passé, y compris dans sa propre histoire militaire. Un homme de coup d’Etat qui veut gouverner en rétablissant un régime militaire.
Concernant les résultats de la réunion et la déclaration publiée à l’issue de la rencontre, il est mentionné dans la déclaration un appel à un cessez-le-feu, à l’exception de la poursuite de la guerre contre le terrorisme sans déterminer qui sont les groupes terroristes et leurs positionnements. Cela risque d’être interprété par : "toute personne qui est contre Hafter est terroriste".
Ceci étant, il est pratiquement impossible d’appliquer le cessez-le-feu et d’intégrer les formations armées dans les forces régulières unifiées tant que Hafter est commandant de ces forces, parce que ce sera des milices ethniques et non une armée nationale comprenant toutes les communautés de Libye. Il y a aujourd’hui des villes qui rejettent complètement toute présence ou rôle de Hafter sur la scène en général.
L’Elysée affirme que « l’objectif de la France est de contribuer à l’élaboration d’une solution politique et d’aider les Libyens à renforcer l’accord politique inter-libyen de Skhirat pour le rendre plus opérationnel et inclusif ». Il rajoute aussi que cette rencontre du 25 juillet 2017 "vise la poursuite d’un dialogue inter-libyen nourri et inclusif dans lequel tous les acteurs de bonne volonté ont leur place". Peut-on dire vraiment que tous les acteurs ont été conviés à cette rencontre ?
Toutes les parties et les sensibilités n’ont été ni présentes ni représentées à la réunion du Palais de l’Elysée. Et de toutes les façons, il est à préciser que ni Sarraj ni Haftar ne représentent les Amazighs. Le véritable objectif de cette réunion est de permettre à Hafter de conclure un accord avec le gouvernement de réconciliation de Sarraj. Et cette issue nous préoccupe parce que Hafter est un des partisans du nationalisme arabe.
Puisque les Amazighs qui représentent une partie très importante dans cette Libye n’ont pas été conviés, puissent-ils se sentir concernés par les conclusions de cette rencontre ? Et si la communauté internationale s’obstine à ignorer les Amazighs et leurs exigences, peut-on espérer un véritable règlement de ce qui est appelé « crise libyenne » ?
Il est inacceptable qu’il soit ainsi parce que les Amazighs sont une partie importante et cruciale pour la stabilité de la Libye et si les préoccupations et les exigences des Amazighs de Libye sont ignorées par la communauté internationale, le risque est grandissant pour accroître les fractures et les rivalités au sein de la société libyenne.
Des élections sont annoncées pour le Printemps prochain. Les Amazighs participeront-ils ? Et si c’est le cas à quelles conditions ?
Devant ce fait accompli, nous ne pouvons pas déterminer notre position, par une participation ou un refus, tant que les enjeux ne sont pas clarifiés par rapport aux nouveaux corps qui seront élus ainsi que la loi électorale.
La Communauté internationale évoque souvent la lutte cotre l’émigration clandestine qui part des côtes libyennes. Les unités militaires amazighes de Zouara effectuent un énorme travail de lutte contre cette émigration et arrive à sécuriser ses côtes. La Communauté internationale - notamment la France, l’Italie et l’Allemagne- apporte-t-elle un appui aux forces militaires amazighes de Zouara ?
En dépit de nos contacts avec l’Union européenne, les organisations internationales et la Mission des Nations Unies en charge de cette question, les forces de la police de la municipalité de Zouara (Imsuten - ⵉⵎⵙⵓⵜⵏ ) n’ont reçu aucun soutien d’aucune part. Il en est de même pour le Croissant rouge de la ville de Zouara qui souffre de manque de soutien et de moyens en raison de la centralisation des autorités de cette organisme basé à Tripoli qui refuse délibérément de soutenir le Croissant rouge de Zouara au mépris de sa propre contribution vis-à-vis de l’organisme central du Croissant rouge libyen de Tripoli.
Récemment, un fatwa contre l’ibadhisme a été prononcée par un groupe libyen. C’est un véritable appel au génocide. Pouvez-vous nous dire plus à ce sujet ?
Le HCAL a eu à réagir à cette fatwa et la menace de génocide visant les Amazighs dans une déclaration en date du 10 juillet 2017. (Lire la déclaration)
Quel est votre message à la communauté internationale qui prétend vouloir trouver une solution à la crise libyenne ?
Comme nous l’avions exprimé dans nos dernières déclarations, nous appelons la Communauté internationale à assumer ses responsabilités et à faire respecter le droit international face aux graves graves agissements qui visent les Amazighs comme l’illustrent la fatwa de la Commission des fatwas de la Haute autorité libyenne des Awqaf et des affaires islamiques du Gouvernement provisoire autoproclamé à l’Est de la Libye ou encore les propos de Hafter tenus à France 24.
Propos reccueillis par
Masin Ferkal.